Au royaume des aveugles, les borgnes sont rois
La Nouvelle-Orléans dans les années 60. Ignatius Reilly, sorte de Tanguy avant l’heure, squatte chez sa mère. Fainéant, velléitaire, imbu de sa personne, hypocondriaque, obèse, imbu de sa personne et probablement puceau, Ignatius se prend pour un écrivain.
Sa mère, veuve et un peu portée sur la bouteille, a du mal à joindre les deux bouts après avoir dépensé toutes ses économies pour payer les études de son fils. Au bord de l’exaspération (enfin !), elle le somme de trouver un emploi. Mirna Minkoff, sa camarade de fac, sa petite amie platonique, sa « mouche du coche », l’agent Mancuso, qui est à la police ce qu’Ignatius est à la littérature sont tout autant qu’Ignatius excessifs et apparemment ridicules. Ces trois personnages font partie (volontairement ou pas) du premier cercle de notre héros.
Ignatius est malgré les apparences le parfait représentant du mouvement contestataire hippie par son refus de tout travail salarié, son refus d’entrer dans « le système ». Il tentera même de mettre sur pied la révolte des ouvriers noirs de l’usine dont il sera quelques temps salarié, à l’instar de ce que prônait les Black Panthers.
J’ai été un peu déconcertée par cet ouvrage, incapable de savoir si je l’avais ou pas apprécié, déstabilisée par le style de l’auteur. C’est toute une galerie de personnages à la fois loufoques et tragiques que J.K. Toole dépeint, ces pauvres hères se débattant dans des situations absurdes. A bien y regarder, La conjuration des imbéciles est aussi une critique en creux des Etats-Unis à la fin des sixties : critique des rapports entre les Noirs et les Blancs, entre travailleurs et salariés.
Publié plus de dix ans après le suicide de l’auteur, La conjuration des imbéciles a obtenu le prix Pulitzer à titre posthume en 1981 et fait aujourd’hui partie des classiques de la littérature américaine.
Editions 10-18 – 534 pages – 1989