« S’il fallait un jour que les forêts disparaissent, l’homme n’aurait plus que son arbre généalogique pour pleurer. » – Albert Einstein
Satyacharan, jeune diplômé de Calcutta est sans travail. L’un de ses amis lui propose un poste de régisseur dans les terres de son père. Son travail est d’allouer des terres à des fermiers qui devront défricher la forêt avant de cultiver la terre. L’action se passe dans l’état du Bihar au nord-est de l’Inde, état qui est encore aujourd’hui l’un des plus pauvre du pays.
Satyacharan est un citadin. Son arrivée dans un état rural pauvre est un choc. Il doit s’habituer à un mode de vie aux antipodes de celui dont il a l’habitude : plus de théâtre, plus de cinéma, plus de rencontres entre amis, rien que des paysans pauvres et illettrés et surtout il y a la nature.
Nécessité faisant loi, Satyacharan va devoir s’habituer à son nouvel environnement. Petit à petit, il va prendre conscience de la de la misère des paysans qui viennent lui demander des terres à cultiver, des injustices créées par le système des castes et surtout il va s’attacher à cet endroit unique qu’il est en train de détruire consciencieusement pour le compte de son employeur.
De la forêt est directement inspiré de la vie de l’auteur qui a exercé les mêmes fonctions que Satyacharan entre 1925 et 1930. Ecrit quelques années plus tard, à la fin des années 30, De la forêt résonne étrangement aujourd’hui. Il suffit de remplacer l’Inde par le Brésil et on retrouve tous les éléments du drame écologique et social qui se joue dans le plus grand pays d’Amérique latine : la spoliation des paysans, l’extrême pauvreté, le mépris des peuples autochtones, le fossé entre citadins et ruraux.
Ecrit dans une langue imprégnée de poésie, la description magnifique de cette forêt unique n’édulcore en rien le drame qui se joue au quotidien entre grande pauvreté et saccage de l’écosystème. De la forêt est considéré comme le premier roman écologique mais il n’a manifestement pas suffit à éveiller les consciences. Quatre-vingt ans plus tard, la déforestation continue partout sur la planète.
Bibhouti Boushan Banerji (1894-1950) est un écrivain important de la littérature indienne. Très prolifique, il a publié plus de 40 romans et nouvelles. La situation du Bihar, l’état où se déroule le roman est toujours l’état le plus pauvre de l’Inde : 80 % de la population travaille dans l’agriculture dont plus de 100 000 saisonniers pour lesquels ce travail n’est qu’une activité de subsistance comme à l’époque du roman.
Editions Zulma poche – 2022 – 330 pages